Archive | décembre, 2019

L’actionnariat salarié peut sauver nos retraites – Chronique aux Echos

20 Déc

Les grands prix de l’actionnariat salarié ont été remis mercredi dernier dans les locaux d’Amundi par Pierre-André de Chalendar, PDG de Saint-Gobain, à huit entreprises ayant des parcours d’excellence en la matière. Il y avait des grands groupes cotés, mais aussi des PME et des ETI. Le champion était Bouygues, avec aujourd’hui plus de 20 % du capital contrôlé par son personnel, un chiffre considérable qui salue l’efficacité d’une politique à long terme d’association du personnel. Il y avait aussi Veolia et Spie. Les récipiendaires ont tous insisté sur le fait qu’un fort actionnariat salarié transforme complètement l’ambiance dans l’entreprise, il développe la connaissance de l’économie de marché et modifie le comportement des patrons qui se sentent responsables des économies de leurs salariés. L’actionnariat salarié est un des chemins les plus directs permettant aujourd’hui d’aller vers un capitalisme acceptable par tous. Il y avait aussi des entreprises moins connues (privées ou publiques) disposant toutes de jolies parts de marché dans leur domaine ; chacune connaissait une forte croissance, situation qui permet aux collaborateurs de bénéficier pleinement de la création de valeur. Elles avaient pour nom Trescal, Naval Group, BCF Life Sciences et Ipsen. Fait très intéressant, plusieurs étaient sous LBO… comme quoi le private equity peut être, lui aussi, un des plus efficaces promoteurs de l’actionnariat salarié. Il y avait enfin dans la salle les plus anciens, Schneider et EssilorLuxottica, qui ont eux aussi témoigné, lors des tables rondes, que des retraités, quand ils avaient été salariés actionnaires tout au long de leur vie de travail, disposaient, au moment où ils quittaient leur entreprise, de capitaux considérables permettant de doubler, voire tripler leur retraite officielle. Sachant qu’il vaut mieux s’appuyer sur deux jambes que marcher à cloche-pied, nos dirigeants politiques et nos syndicats seraient bien inspirés de sérieusement pousser cet actionnariat salarié. Celui-là contribue en effet à rendre le capitalisme plus acceptable, mais il peut aussi devenir un deuxième pilier solide pour le financement de nos retraites.

L’Europe doit viser le leadership mondial – Chronique aux Echos

13 Déc

L’Union européenne en mal d’un grand projet ? Chaque Européen devrait se rappeler ce qui s’est passé sur notre continent au début du siècle quand des scientifiques de tous les pays européens ont bâti en vingt-cinq ans les fondements de la physique quantique. Le Danois Niels Bohr, les Autrichiens Schrödinger et Pauli, les Allemands Planck et Heisenberg, l’Anglais Rutherford, l’Ecossais Maxwell, l’Italien Tesla, le Français de Broglie et, bien évidemment, Einstein : tous étaient à la manoeuvre, spontanément, dans ce grand projet fédérateur. Ils étaient mathématiciens, physiciens, chimistes, expérimentateurs, tous se renvoyaient la balle. Ils avaient des approches très différentes, fruits de la variété de leurs origines géographiques. C’est cette confrontation organisée par les universités, mais aussi par les entreprises, en particulier Solvay, et par les clubs scientifiques de l’époque, qui a permis cette avancée intellectuelle fulgurante de la physique sans laquelle lasers et ordinateurs n’auraient pas vu le jour. Folie des uns, lâcheté des autres, la guerre a provoqué une boucherie humaine sans précédent dans l’histoire et une effroyable fuite des meilleurs cerveaux. L’avance intellectuelle que l’Amérique a acquise aujourd’hui, et dont le leadership dans le Net est la manifestation la plus évidente, n’est qu’une lointaine conséquence de ce qui s’est passé alors.

L’Europe doit tirer la leçon de cette monstrueuse erreur sans laquelle elle dominerait encore le monde. En ce moment où les autres avancent, elle doit s’unir, faire bloc et se relancer. La leçon à tirer de la construction intellectuelle de la physique quantique est que sa variété est une force, que cette force est toujours là à condition de laisser leur spécificité et leur marge de manoeuvre aux peuples qui la composent. Une façon de continuer à la construire est de choisir une demi-douzaine de grands projets constitués en fonction des talents et des savoir-faire respectifs des peuples européens. Ces projets doivent correspondre aux grands défis à résoudre pour garder notre planète et sa population en bonne santé dans les domaines industriel, écologique et scientifique. Ils doivent viser, sans complexe, le leadership mondial dans chacun des domaines choisis !

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La société de confiance – Chronique aux Echos

6 Déc

Il y a vingt-cinq ans, Alain Peyrefitte écrivain et homme politique nous quittait. Dans « Le Mal français », il expliquait, après quarante ans de vie politique, combien la France était difficile à gouverner. Alain Peyrefitte a eu la chance d’échanger avec le général de Gaulle, en tête à tête, quotidiennement pendant plus de dix ans. « C’était de Gaulle » restitua les réactions du grand homme aux événements de l’époque. Tout le monde connaît « Quand la Chine s’éveillera », fulgurante anticipation qui permit à la France d’être le premier pays à reconnaître les potentialités de ce pays continent.

La partie peut-être la plus intéressante de son oeuvre est la réflexion qu’il a entreprise, une fois à la retraite. Il s’est alors plongé dans l’économie en cherchant à percer le mystère du développement : quelles sont les conditions qui font que les économies décollent ? Il a mis en évidence le « tiers facteur » qui n’est ni le capital ni le travail mais… le climat de confiance !

Dès qu’on arrive à installer un climat de confiance, les pays se mettent à tourner. Trois ingrédients dans cette recette miraculeuse : il faut d’abord que les gens aient confiance en eux, difficile équilibre entre modestie excessive et arrogance qui fait que quelqu’un s’épanouit ; il faut ensuite qu’ils aient confiance les uns dans les autres (rien ne vous fait autant de bien que de savoir qu’on a confiance en vous !). Mais ça ne suffit pas, surtout dans le cas des Français, encore faut-il avoir confiance dans la stratégie ! C’est ce que Napoléon avait très bien compris en allant sur le terrain expliquer lui-même aux grognards, la veille de la bataille, la stratégie du lendemain.

 

Ces recettes sont concentrées dans un dernier ouvrage « La Société de confiance ». En ces temps où les Français doutent et se méfient de tout, alors qu’ils sont talentueux et pourraient faire des merveilles, il faut impérativement lire, méditer et discuter ce bijou, un des plus beaux legs des périodes gaullienne et pompidolienne. L’idée la plus fine, en hommage à ce grand homme, consisterait à éditer « La Société de confiance » dans un format qui permettrait de le vendre à 7 euros et, osons l’idée, l’introduire dans les cours d’économie de terminale.

 

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L’Allemagne reste un modèle à suivre – Chronique aux Echos

2 Déc

L’usine Tesla de Berlin : belle affaire pour l’Allemagne, bravo ! Trois milliards d’investissements dans une filière d’avenir et 10.000 emplois directs, sans compter les partenariats qui vont se nouer. Nous avions des arguments en face, pourquoi n’avons-nous pas réussi ? Il y a eu peu de commentaires en France sur cette annonce. On pourrait pourtant chercher à comprendre pourquoi l’Allemagne a gagné, là où nous avons échoué.

Et si les personnes à féliciter étaient tout simplement Hartz et Schröder ? Rappelons-nous les années 2000 : l’Allemagne était l’homme malade de l’Europe ; sa sphère publique, enflée par les coûts du rapprochement avec l’Est, occupait 55 % du PIB (la nôtre était alors à 54 %). La politique allemande a consisté à s’attaquer aux dépenses publiques et sociales, notamment en réduisant les indemnités de chômage, en retardant l’âge du départ à la retraite, en préférant le temps partiel au RSA et en introduisant un ticket modérateur dans les dépenses médicales. Tout le monde s’est remis au travail, la dépense publique est tombée en dix ans à 44 % du PIB, baissant le coût d’opération sur le territoire allemand ainsi que les impôts. L’Allemagne a aujourd’hui des budgets et un commerce en excédent, elle réduit sa dette et, cerise sur le gâteau… elle est devenue attractive !

Nous avons, depuis 2004, fait l’inverse en continuant à laisser filer les dépenses publiques et sociales à 57 % du PIB, endettant, chaque année un peu plus, notre Etat. Bien évidemment, les impôts ont grimpé. Notamment les impôts de production sur les entreprises.

S’il suffisait de booster ses sphères publiques et sociales pour créer de l’activité, quitte à lâcher les déficits, nous aurions la plus forte croissance mondiale ! Regardons les faits depuis dix ans : l’industrie allemande nous met dans la vue chaque année très exactement 1,5 % de croissance.

Oublions les théories, et copions les politiques qui marchent. Dans un monde concurrentiel, il faut être compétitif. Que l’affaire Tesla soit l’occasion d’une prise de conscience et nous pousse à adopter, comme ils l’ont fait il y a quinze ans, une politique de compétitivité.

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