Archive | octobre, 2016

Pour que vogue l’agriculture – chronique aux Echos

27 Oct

Dure période pour nos éleveurs qui luttent pour survivre : le surcoût de notre sphère publique par rapport à celle de l’Allemagne ou des Pays-Bas représente jusqu’à 20 % de leur prix de revient complet : quoi qu’ils fassent, cet écart les plombe. S’y ajoute un retard dans la méthanisation, résultat du travail de sape des écologistes. Difficile, enfin, de se différencier, car les normes (qui ont certes permis le marché unique et l’émergence de leaders mondiaux tel Airbus), sont devenues, par leur excès de détail, des machines à transformer tout produit en commodité. Ceci étant dit, la France a une image exceptionnelle en matière de nourriture, grâce au travail de nos grands chefs : il y a là un atout à saisir. Les coûts de transport par mer Brest-Shanghai ne sont pas plus élevés que ceux de Brest-Marseille par voie de terre : les produits d’excellence vont désormais au bout du monde. Les opportunités ne manquent pas.

Les Français ont inventé le modèle des grands crus vinicoles. En jouant sur le sol, les cépages et les process, ils ont su créer un métier mondial et rentable. L’élevage a, lui aussi, ces trois dimensions : la race , l’aliment et le mode d’élevage ; en s’inspirant des viticulteurs, une stratégie de différenciation est possible. La profession peut s’organiser (du producteur au transformateur), désigner des chefs de produit, créer à l’occasion du Salon de l’agriculture de 2017 un concours de grandes appellations pour les différents types de viande, à l’instar des grands crus du Bordelais…

Une remarque, cependant : quelle que soit la qualité de ses voiles et l’excellence de son barreur, un voilier ne gagnera pas la régate s’il est trop chargé et si sa coque est couverte de berniques ; tout est encore possible, mais nos agriculteurs ne s’en tireront que lorsquela sphère publique aura drastiquement réduit ses coûts.
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Enseignement : le grand gaspillage – Chronique aux Echos

20 Oct

 

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On s’est félicité en apprenant que 9 enfants sur 10 avaient été reçus au bac 2016, puis une étude de l’Apses (Association des professeurs de sciences économiques et sociales) a douché l’enthousiasme : à peine 32 % des élèves réussissent leur licence du premier coup. Le taux de succès au bac est artificiellement gonflé : en réalité, il aurait dû être de 35 % (32 divisé par 0,9). Conclusion : seules les mentions bien (20 %) et très bien (14,5 %) sont en position de faire de bonnes études à l’université ! Autre alerte, l’Académie française s’inquiète d’études concordantes montrant que 20 % des enfants sortent du primaire sans maîtriser la lecture.

En envoyant en secondaire un élève qui ne sait pas lire, ou un bachelier insuffisamment préparé à l’université, on met les élèves en situation d’échec. On gaspille les ressources du corps professoral, car plus on progresse dans le cursus, plus la proportion d’élèves en décrochage augmente. L’absence de sélection, pour des raisons dogmatiques, détruit toute l’organisation. Voilà pourquoi notre système éducatif a un coût élevé et descend chaque année dans les classements Pisa et de Shanghai.

Les éducations nationales allemande et hollandaise ont connu les mêmes chutes il y a quinze ans et les ont prises très au sérieux. Elles se sont rendu compte que beaucoup d’élèves rêvaient de filières techniques mais étaient maintenus dans la filière générale, faute d’enseignants formés à ces disciplines. Système éducatif et entreprises se rapprochèrent, la technologie fut promue filière d’excellence, on orienta plus tôt en développant l’apprentissage. L’un des résultats les plus probants fut la quasi-disparition du chômage des jeunes.

Pour que chacun de nos jeunes trouve le métier adapté à ses talents et que notre pays redresse sa compétitivité, élargissons la gamme des enseignements vers la technologie. Ce sera possible, nos voisins l’ont démontré, le jour où notre Education nationale saisira la main qui lui est tendue par les entreprises !
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Le solaire contre la décroissance – chronique aux Echos

13 Oct
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Des signes concordants en provenance du monde entier montrent que la production d’énergie solaire explose. Les toits se couvrent de panneaux aux Etats-Unis ; des projets gigantesques utilisant des millions de panneaux sur des kilomètres carrés, sont annoncés chaque semaine en Chine, au Mexique , à Dubaï , en Indonésie. Les statistiques le confirment : pour les six premiers mois de 2016 , l’énergie solaire représente, aux Etats-Unis , 64 % de l’augmentation de toute l’énergie électrique ! Et ce n’est pas un pic temporaire. Si l’ on regarde en arrière , le taux est passé de 4 % en 2010 à 27 % en 2013 ; le gaz de schiste est enfoncé. Autre confirmation de la croissance, les prix de gros de l’électricité chutent partout où on a érigé des fermes solaires . Le prix le plus bas du monde a été annoncé la semaine dernière : 3 centimes le kWh pour la dernière unité localisée à Dubai ! Ces chutes viennent principalement des composants qui rentrent dans les panneaux . Leurs coûts ont été divisés par 50 en trente-cinq ans grâce à une multiplication par 100.000 des volumes. Cette chute est aussi le résultat d’un partage d’expérience avec la production des microprocesseurs. Vu l’efficacité des outils industriels qui se montent partout, le phénomène va s’amplifier. La très haute technologie et les industries du XXIe siècle débarquent en force ; elles vont permettre d’économiser des matières premières et aider à la préservation de l’environnement. Le prix du pétrole n’est pas près de remonter, l’Afrique a une chance unique à saisir pour se développer et les équilibres géopolitiques mondiaux vont en être durablement modifiés . L’impact est plus profond , il est d’ordre philosophique : la sauvegarde de la planète ne passe plus nécessairement par des stratégies de décroissance. Derrière cette bonne nouvelle, une réalité simple qu’on avait oubliée : la plus grosse centrale nucléaire de l’univers travaille chaque seconde pour notre bonne vieille Terre c’est… le Soleil !
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N’enterrons pas l’automobile – Chronique aux Echos

6 Oct

C’est la quizaine du Salon de l’automobile. Peu de gens réalisent qu’Apple capitalise à lui seul beaucoup plus que tous les constructeurs automobiles réunis. On pourrait y voir un signe de déclin. L’industrie automobile, c’est vrai, est soumise en ce moment à des chocs violents.

Le premier concerne le moteur, avec l’attaque de l’électrique à court terme et peut-être de l’hydrogène à moyen terme – ceci dit, le thermique se défend : en dix ans, pour une même cylindrée, la puissance a augmenté de 20 % et la consommation baissé d’autant !

Deuxième choc : les changements de business models, avec l’Autolib de Bolloré, où la voiture est louée à l’heure, l’autopartage avec BlaBlaCar et Drivy, et enfin Uber, qui révolutionne le métier de taxi et fait baisser le coût d’utilisation d’une voiture en ville (pas de parking et 100 % d’utilisation), au point que beaucoup pensent à se séparer de la leur.

Troisième attaque : celle de Google et Apple, aux poches très profondes, qui pointent le nez avec des projets de voitures sans chauffeur.

On aurait cependant bien tort d’enterrer l’automobile. Elle peut aussi étendre son champ d’intervention, reprendre des parts de marché au rail, comme elle le fait déjà, devenir une batterie d’appoint pour la maison du futur équipée de panneaux solaires ou, si elle se conduit toute seule, être l’endroit où l’on regarde les infos en allant au travail et en en revenant. Bien malin, donc, celui qui peut dire ce qui va se passer. Même s’il y a eu des erreurs autour du diesel, cette industrie centenaire est combative et créative. Dans cette affaire, on cheminera vers les bonnes solutions par une combinaison d’inventions nouvelles, d’erreurs que l’on arrêtera et de trouvailles que l’on développera. Ce foisonnement, que certains pensent désordonné, est en fait la manifestation du génie humain à l’oeuvre. L’industrie automobile doit être encouragée et félicitée pour son comportement, en ces temps incertains et passionnants.