Archive | septembre, 2019

Pour réduire la complexité, faites simple ! Chronique aux Echos

27 Sep

Selon Iref Europe, il y aurait, en 2019, en France, 80.169 articles législatifs votés et 233.048 articles réglementaires publiés. Des chiffres considérables, en croissance constante, puisqu’on en a rajouté, rien qu’en 2018, environ 12.500.

Quand on se penche sur les classements par catégorie de cette production, le domaine dans lequel il y a le plus de législation, ce sont les impôts. Et là où ça se développe le plus vite : l’écologie, le commerce et le bâtiment. Le plus grand écart avec la concurrence étrangère : le travail ou la référence en la matière. Le droit du travail suisse contient 100 fois moins de pages que le nôtre, or le chômage y est négatif, si on tient compte des frontaliers.

On évoque toujours les impôts comme freins à l’activité économique, mais il est clair qu’une surproduction administrative freine aussi le dynamisme. Tout le monde est d’accord pour dire qu’il faut une fonction publique et des lois, sans quoi la société ne peut fonctionner ; mais un excès de lois – qui est, au passage, un marqueur simple de sureffectifs dans cette partie de la société – finit par ralentir l’économie. Il suffit pour s’en rendre compte de parler avec les industriels et les commerçants.

En cette période de concurrence mondiale entre les pays, la plupart des gouvernements, notamment les allemands et les américains, ne s’y sont pas trompés et sont rentrés dans des programmes de déflation suite au succès des programmes de Cameron.

En dernier ressort, le sujet est ontologique et se résume à la question suivante : quand la société se complexifie, faut-il plus ou moins de directives ? La plupart des grands pays occidentaux choisissent de réduire la complexité pour donner plus de pouvoir au terrain. Le point dur : faire simple, c’est du grand art et peut-être aussi ce qu’il y a de plus difficile !

Retraites : et si les Suisses avaient raison ?

20 Sep
Un sondage (Smartvote) fait en Suisse, le 19 août, révèle que la majorité des candidats à la députation est en faveur d’un recul de l’âge de la retraite à… 67 ans. Impensable ici. Pourtant, s’il y a une chose à expliquer dans cette période de consultation sur la loi retraite, c’est comment peut-on s’en tirer, chez nous, sans bouger significativement l’âge de la retraite ni augmenter la durée de cotisation ?

Surcharge pour les entreprises

Rappelons quelques faits. Quand Mitterrand en 1983 a lancé l’idée de la retraite à 60 ans, il y avait 4 cotisants pour 1 retraité et l’espérance de vie était de 72 ans, soit 12 ans de retraite en moyenne. Aujourd’hui l’espérance de vie est de 84 ans, ce qui fait 22 ans de retraite. Et il n’y a plus que 1,7 cotisant par retraité. En trente-six ans, la durée de retraite a été augmentée de 83 % et le pourcentage de ceux qui cotisent réduit de 57 %. On en a remis une couche avec les 35 heures, qui reviennent à annihiler au moins 4 ans de cotisation. Pour faire simple, le ratio cotisants-retraités a été divisé par cinq. On a certes doublé la part du PIB consacrée aux retraites à 13,8 % (sous Mitterrand le ratio était d’environ 7 %), mais au prix d’une surcharge accrue pour nos entreprises. Il y a aussi eu des gains de productivité, mais la situation n’est absolument pas tenable.

Les Suisses ne consacrent aujourd’hui pour leur retraite que 7,5 % de leur PIB (grâce notamment au recours à la capitalisation), mais, malgré cette marge de manoeuvre, ils préfèrent allonger encore leur durée de travail. On dira : « Ils sont différents ! » Regardons alors nos autres voisins : le départ à la retraite se situe partout entre 65 et 67 ans. Si partir à 67 ans est un argument électoral de l’autre côté de la frontière, est-ce parce que le chocolat qu’ils consomment leur dérègle l’esprit ou parce qu’ils sont, contrairement à nous, humbles devant les faits et capables de se remettre en question ?

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La concurrence, un facteur d’égalité – Chronique aux Echos

17 Sep
Interrogé par des journalistes à la suite de sa défaite de Wimbledon, Roger Federer a eu, sur sa vision de la concurrence, des mots que chacun de nous devrait méditer. « Nos résultats montrent que nous pouvons avoir des carrières incroyables en jouant au même moment tous les trois [Roger Federer, Novak Djokovic, Rafael Nadal, NDLR] ; les gens pensent que nous nous sommes pris des titres, ce qui est sans doute vrai, mais nous sommes également poussés les uns par les autres. Chacun progresse au contact des autres, je pense que nous sommes devenus les joueurs que nous sommes grâce à cette rivalité entre nous. » Ce que dit ce formidable champion, élégant et unanimement reconnu, dépasse très largement le cadre du sport pour s’appliquer à toute activité humaine : l’art ? Pensez à Monet, Renoir et Pissarro. La recherche scientifique ? Pensez à Albert Einstein, Niels Bohr et Max Planck. Les Beatles auraient-ils porté la musique aussi haut sans les Rolling Stones et les Bee Gees ?

L’émulation fait grandir

Ceci est évidemment vrai dans le domaine de l’entreprise. Ce que l’on n’explique pas assez à nos concitoyens, c’est que l’émulation fait grandir. La concurrence est mal vue dans notre pays, où elle évoque l’idée du gros qui écrase le petit. Federer nous rappelle que, quand elle est saine, elle est la meilleure des écoles et que le tuteur le plus efficace est toujours l’adversaire le plus redoutable. La concurrence est une école d’humilité parce qu’elle vous évite de prendre la grosse tête. La concurrence est spontanément généreuse puisqu’en provoquant la baisse des prix elle redonne aux consommateurs les gains de productivité. En s’attaquant aux monopoles, la concurrence est facteur d’égalité. Quand on y réfléchit bien, la concurrence est un autre nom qu’on pourrait donner à la liberté. Le jour où chaque élève, dans nos écoles, aura compris cette idée simple, rendue plus audible quand elle sort de la bouche d’un champion sportif incontesté, notre pays ira probablement beaucoup beaucoup mieux !

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Les entreprises et le bien commun – Chronique aux Échos

15 Sep
Quelques signaux convergents sont peut-être l’annonce que l’attitude des Français par rapport à l’entreprise est en train de changer. En introduction d’un débat sur le don, à l’université d’été du Medef, le secrétaire d’Etat, Gabriel Attal, a déclaré que le monopole de l’intérêt général n’était pas entre les mains de l’Etat, les entreprises pouvant très bien y contribuer. Parallèlement, un certain nombre de grands groupes, entraînés par Emmanuel Faber, le PDG de Danone, réfléchissent à la façon d’adopter des mesures plus inclusives, car les économies de marché doivent évoluer si elles veulent perdurer.

Il est utile d’expliquer pourquoi une entreprise respectueuse des personnes, tout en défendant les intérêts de ses employés et de ses actionnaires, contribue à l’intérêt général. On n’aime pas la concurrence (le fort écrase de faible), on n’aime pas le concept d’intérêt particulier (synonyme d’égoïsme), la fidélité a quelque chose de ringard (forme de captivité). Pourtant, quand on les met ensemble, ils se bonifient entre eux. Quand une entreprise a une relation de long terme avec un fournisseur, alors que chacun des partenaires peut, grâce à la concurrence, cesser la relation à tout moment, c’est bien que les intérêts particuliers du fournisseur et de l’entreprise convergent ; cela est tout aussi vrai pour les employés et les actionnaires.

Rappelons que les grands leaders ont pu atteindre des positions fortes parce qu’ils ont su créer des relations stables. Perdre ses clients empêche de croître, perdre ses employés entraîne des chutes de productivité et l’explosion des coûts de formation, l’instabilité actionnariale interdit d’avoir une stratégie long terme. Autrement dit, la fidélité dans un monde de concurrence permet defaire converger les intérêts particuliers vers ce qu’on ne peut appeler autrement que l’intérêt général.

Les Français vont-ils adopter ces vérités simples qui sont vécues par de nombreuses entreprises ? Le bien ne fait pas de bruit et on a tendance à communiquer en priorité sur ce qui ne marche pas. Le chemin est encore long, mais tout peut arriver. Ce serait une manière de sortir, à la française, du concept de lutte des classes et… une excellente nouvelle !

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