Archive | octobre, 2019

Cultivons l’actionnariat patient – Chronique aux Echos

25 Oct
On entend presque quotidiennement des voix se plaindre de la pression mise par le marché financier sur les résultats à court terme sur nos entreprises cotées. Les porteurs de ces messages ont fondamentalement raison parce que le court-termisme, s’il est appliqué trop longtemps, revient à réduire les frais de recherche et développement. On passe ainsi à côté de tous les projets demandant une longue maturation, qui par expérience sont les plus rentables à terme. Les preuves de ce raisonnement abondent, notamment avec les études montrant que les entreprises familiales (moins sensibles aux pressions court terme) ont des rentabilités supérieures à la moyenne. Sans compter le clin d’oeil donné en ce moment par nos quatre géants français leaders mondiaux du luxe que sont Hermès, Kering, L’Oréal ou encore LVMH.

Il y aurait une façon très simple de favoriser un actionnariat patient. Il suffirait dans les prochaines lois de finances de réduire la fiscalité sur les plus-values de très long terme, celles concernant la vente d’actions détenues depuis plus de vingt ans par exemple, en baissant le taux d’impôt à 20 % pour avoir des chiffres percutants.Le passage à la flat tax et la baisse du taux de l’impôt sur les plus-values n’ont pas été (loin de là !) une mauvaise affaire pour nos finances publiques ; baisser la fiscalité sur les plus-values très long terme serait donc positif pour elles. Mais, plus important, on montrerait que notre pays est en train de changer, en devenant l’un des endroits au monde où les actionnaires patients sont le mieux récompensés. L’investissement étranger reviendrait et on commencerait à réparer les dégâts causés par l’ISF (perte de talents et sortie d’investissement) pendant les trente-quatre années où il a été à l’oeuvre chez nous.

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Les limites de la logique keynésienne – Chronique aux Echos

18 Oct
L’économiste Claude Sicard vient de publier une étude montrant, graphiques à l’appui, que la politique française visant à corriger les inégalités a pour effet de plomber l’industrie et de réduire le PIB par habitant.La réduction n’est pas l’épaisseur du trait, c’est un facteur de 1 à 2 sur cinquante ans si on regarde les parcours relatifs de la France et de la Suisse. Quand on entend nos ministres proclamer leur volonté de défendre l’industrie, comme Bruno Le Maire vient de le faire cette semaine avec le « pacte productif », et laisser au même moment passer un budget en déficit (malgré le niveau d’impôts le plus élevé au monde), on est tenté de leur conseiller de prendre une feuille blanche et de faire eux-mêmes les calculs qui suivent.

Soient deux pays dont les sphères publiques ont le même périmètre et occupent 57 % du PIB pour le premier et pour le second 44 %. Calculons le prix de revient complet de deux industriels situés chacun dans un de ces deux pays en supposant que leur coût hors taxes est de 43 euros. Charges sociales et impôt seront de 57 euros pour le premier, soit un total de 100 et 43 × (44/56) soit 34 euros pour le second donc un coût chargé de 77 euros. Pas besoin d’être grand clerc pour comprendre que, même si nous sommes dans les ordres de grandeur, l’industriel qui a la malchance d’être tombé dans le mauvais pays se fera laminer à l’exportation sur la durée à moins de délocaliser ses productions. Un calcul accessible aux élèves de sixième (100 (1+57/43) ) / (100 (1+44/56) ) = 56 / 43) montre que les prix de revient relatifs sont dans le rapport inverse des parts des sphères privées dans l’économie.

Ce raisonnement ne s’applique qu’à l’industrie et non aux services où les concurrents portent les mêmes charges du fait de la nature locale de l’activité. Il démontre aussi que, dans un monde concurrentiel, la logique keynésienne si elle n’est pas cantonnée à des interventions temporaires, ravage les industries.

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En finir avec l’impôt sur les successions – Chronique aux Echos

17 Oct

Les pays scandinaves, et la Suède en particulier, ont toujours été pour nous un modèle de politique sociale. Il est donc judicieux de suivre de près ce qu’ils font. Cette dernière vient de prendre, en matière de fiscalité sur les successions, une décision qui décoiffe : elle met les taux de succession à… zéro ! Le soudain allongement de la durée de vie provoque toute une série de changements, le financement de la retraite est le premier qui vient à l’esprit, mais il est loin d’être le seul. Deux autres phénomènes s’observent en ce moment. Le premier : une bonne moitié des retraités restent actifs, aux Etats-Unis, on les appelle les « Perennials ». Cette population est le pilier opérationnel et financier de la sphère bénévole, celle-ci représente 17 millions de personnes en France, activité considérable qui rend des services importants dans les domaines sociaux, culturels, sportifs et éducatifs. Elle est en croissance et va demander de gros investissements. Deuxième effet du vieillissement, lui aussi totalement imprévu, les héritiers ne sont plus des trentenaires mais des jeunes… retraités ! Au vu des changements décrits ci-dessus, il serait judicieux de bien réfléchir à la fiscalité des successions et des donations. Ce sont les petits-enfants, voire les arrière-petits-enfants et non plus les enfants qu’il faut aujourd’hui aider. Il faut donc revoir les taux. Il est tout aussi important d’encourager le financement des fondations qui servent l’intérêt général. Certaines agissent sur le même terrain que la sphère publique, elles peuvent très efficacement la soulager, voire s’y substituer. Cela permettrait de substantielles économies budgétaires et faciliterait des baisses d’impôt.

Nous détenons en France le record du monde des droits de succession, certains voudraient encore les augmenter. En mettant les taux de l’impôt sur les successions à zéro, la Suède a pris une position claire, celle de laisser l’argent circuler dans la sphère privée en donnant la main aux personnes elles-mêmes. Message à méditer, puisqu’il vient d’un pays que nos dirigeants politiques nous ont toujours donné en exemple.

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Le retour en grâce de l’apprentissage – chronique aux Echos

4 Oct
L’apprentissage connaît cette année un très solide développement. Serions-nous en train de nous inspirer de nos voisins, en particulier des Pays-Bas et de l’Allemagne, qui y recourent quatre fois plus que nous ? Rappelons que cet écart coïncide avec un taux de chômage de leurs jeunes… quatre fois plus bas que le nôtre.C’est bien… mais il faut savoir que le chemin sera très long si on veut atteindre leurs performances, parce que, aux Pays-Bas, ce sont 40 % des jeunes qui passent par l’apprentissage. Avec une autre différence, elle aussi fondamentale, l’orientation se fait chez eux à 12 ans et pas à 16 ans comme chez nous. Orienter tard a le défaut de laisser trop longtemps dans la voie générale des jeunes qui ont l’esprit concret et s’y ennuient. Par voie de conséquence, ils ont de moins bonnes notes, avec un résultat dommageable : leur réorientation vers les filières techniques a une saveur d’échec.

Les Olympiades des métiers

On peut rapprocher cette dynamique de l’apprentissage du succès des Olympiades des métiers de l’artisanat (inventées, il faut le savoir, par les Scandinaves), qui rencontrent en France un engouement croissant. Ces Jeux Olympiques des plâtriers, soudeurs, menuisiers (il y a 37 disciplines) ont l’immense avantage de démontrer que l’excellence mondiale sur un sujet très pointu (fût-elle artisanale) a au moins autant de valeur qu’une culture générale qui consiste trop souvent à savoir un peu… sur tout.

Pour une fois, la France s’inspire des bonnes pratiques de ses voisins en arrêtant de dire systématiquement : « ça ne nous concerne pas, chez nous c’est différent ! »C’est peut-être la leçon la plus importante à tirer de ces deux excellentes nouvelles.

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Des chiffres et des faits Chronique aux Echos

2 Oct

Les Français aiment les idées, pas les chiffres. Eh bien arrêtons-nous sur ceux du commerce extérieur, qui viennent de sortir. Côté marchandises, ils sont négatifs : -50 milliards d’euros. Normal, notre terreau n’est pas favorable aux producteurs. Comment voulez-vous faire avec une sphère publique à 57 % du PIB, dont les coûts rentrent dans les prix de revient, quand celle de notre voisin et principal concurrent, l’Allemagne, est à 43 % ?

Dans le domaine des services, c’est mieux, un excédent de 25 milliards. C’est le dynamisme de la profession qui booste le tourisme, bien aidé par le capital historique accumulé par nos ancêtres depuis des siècles.

Là où les choses deviennent intéressantes, c’est avec le niveau des dividendes versés au siège par les filiales étrangères de nos affaires françaises : +25 milliards. Le mot dividende hérisse le poil de nos compatriotes, sauf que dans ce cas il s’agit de dividendes internes aux groupes, qui servent à financer la recherche et les effectifs des sièges ici en France.

Au total le système est en équilibre, une performance dont on ne parle pas assez. Il faut expliquer à nos compatriotes qu’en montant des usines à l’étranger, ce qui leur est souvent reproché, les chefs d’entreprise ne font rien d’autre que défendre leurs entreprises, leurs clients, leurs employés et leurs actionnaires. Ajoutons que grâce à ce mouvement notre système industriel est peut-être, par son assise décentralisée, en train de devenir plus résilient que d’autres modèles fondés sur l’exportation. Ça permettra de résister aux guerres commerciales qui s’annoncent. On peut, au passage, donner un grand coup de chapeau à nos expatriés et à leurs familles qui ont contribué à créer et à faire vivre un réseau dont l’efficacité est en train de faire ses preuves. On fustige les dividendes et les délocalisations par manque de compréhension de l’économie. On devrait plutôt féliciter le bon petit cheval « entreprise française » qui ne s’en tire pas si mal alors qu’il porte un jockey bien trop lourd, et expliquer à nos gouvernants qu’avec des dépenses publiques dans la moyenne européenne, nos entreprises feraient un véritable tabac !

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