Archive | avril, 2018

Et l’objet social de la sphère publique ? Chronique aux Echos

27 Avr
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Un rapport a été demandé à Nicole Notat et Jean-Dominique Senard sur l’entreprise objet d’intérêt collectif. La démarche montrant que celle-ci contribue à l’intérêt collectifquand elle est soucieuse des dimensions sociale et environnementale est une bonne chose. Peut-on suggérer néanmoins que, sur un sujet aussi central, on se donne du temps, en menant de front une réflexion sur la place du service public dans la société (car tout fait système), et que l’on collecte plus de données sur la situation réelle de nos entreprises ?

Le souci premier exprimé dans le rapport est la financiarisation croissante de l’entreprise, mais la raison en est simple et les politiques publiques en sont la cause première ! Nous détenons aujourd’hui le record du monde des dépenses publiques en pourcentage du PIB (57 %). Est-ce conforme à l’intérêt collectif qu’une sphère publique atteigne cette taille ? Son coût entre dans les prix de revient des entreprises et les affaiblit dans la concurrence mondiale ; et surtout, la fiscalité induite est devenue tellement élevée que beaucoup de capitaux d’origine française ont fui, entraînant automatiquement la financiarisation de l’économie.

La question de fond est : « Dans une économie mondialisée, un pays peut-il caler sa dépense publique à un niveau très différent de ses voisins ? » De nombreuses entreprises sont en avance sur les sujets sociaux et environnementaux, et les choses évoluent naturellement dans un sens positif parce que les esprits changent. Ces progrès ne sont pas connus du public comme ils le mériteraient parce que, pour un bon nombre de médias, l’actualité est constituée par du spectaculaire négatif : on ne parle que très rarement de ce qui marche. Peut-on suggérer aux députés de demander un rapport sur ce que font en ce moment les meilleures des entreprises, de regarder de très près ce que dit le Code civil de nos voisins et de suivre le vieil adage qui recommande de ne pas confondre vitesse et précipitation ?

Autopsie d’une dérive – Chronique aux Echos

18 Avr

C’est le mois des AG pour les entreprises, mais aussi la période ou les grands instituts sortent les performances des pays ! Nous rétrogradons de la 5e à la 7e place mondiale en termes de PIB… pas surprenant, nous détenons le record du monde des dépenses des administrations publiques en pourcentage du PIB, et on a rarement vu un jockey obèse gagner le Prix de l’Arc de triomphe ! Se comparer à plus petit que soi fait sourire certains, mais quand les écarts sont instructifs, il faut le faire. Le PIB par tête de la Suisse est au haut des classements, elle affiche des comptes publics et extérieurs florissants et sa dette publique passe sous les 30 %. A la mort de Pompidou, la France avait exactement les mêmes caractéristiques qu’elle ! Comment avons-nous pu dériver à ce point ?

La France n’a pas voulu de la réforme régionale présentée par de Gaulle, une sphère publique décentralisée comme en Suisse où la concurrence entre les cantons pour attirer les entreprises permet un contrôle naturel des coûts. Avec la retraite par répartition à 60 ans la France fait encore le contraire des Suisses, qui ont opté pour une retraite à base de capitalisation ; choix somptueux quand on sait que la Bourse a été multipliée par vingt en trente ans, ce qui permet à même prestation des cotisations deux fois moindres. Alors que les Suisses ont gardé leur droit du travail à 40 pages, le nôtre est monté à 4.000. Nous avons cru limiter le chômage avec les 35 heures, eux ont refusé par référendum l’augmentation des vacances à cinq semaines. Seule notre santé est compétitive par rapport à la leur.

Les choses sont simples : l’empilement des couches régionales et leur gestion jacobine, c’est un surcoût de 5 % du PIB. La retraite par répartition, c’est 300 milliards d’euros de cotisations, 14 % du PIB et un surcoût de 7 %. La Suisse n’a pas de chômage, le coût de notre chômage structurel (tout bien pesé), c’est encore 4 %. Arrondissons le total à 15 %, cela donne une idée du fossé à combler dans les quinze ans qui viennent si nous voulons recoller au peloton de tête.

Trois nouvelles qui vont dans le bon sens – Chronique aux Echos

6 Avr

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Le déficit public passe sous les 3 %, très bien ! La bonne nouvelle n’est pas celle-là, parce que tout le monde sait que le 3 % n’a pas grand sens économique et que la vraie norme c’est… 0 %. La bonne nouvelle pour les entrepreneurs, c’est la réaction de la presse qui, de façon unanime, a enregistré le progrès (c’est déjà un progrès), mais a expliqué qu’il est dû à la croissance économique (exogène),en rappelant que les dépenses publiques ont continué à croître, qu’elles sont bien plus élevées que partout ailleurs (les tableaux de comparaison l’ont amplement démontré) et annoncé que ce handicap fera mal le jour où la croissance tombera. Tous concluent que la baisse des dépenses publiques est incontournable et que ce point sera jugé par l’histoire.

Deuxième bonne nouvelle : les Français acceptent de se comparer à l’extérieur. Le « nous, c’est différent ! », cette forme d’arrogance, est en train de disparaître.

Troisième bonne nouvelle : la performance de la Suède. La Suède, modèle dont on nous a rebattu les oreilles, est le pays qui a le plus baissé sa dépense publique ! La part de celle-ci dans le PIB est de 50 %, contre 57 % ici. Elle a affiché une croissance plus forte de 1,2 % l’an que la nôtre (il suffit de regarder les chiffres de la Banque mondiale), alors que d’après toutes les théories qu’on nous a rabâchées depuis quarante ans, la chute de la dépense publique aurait dû casser sa croissance.

Saluons au passage le courage d’Olivier Blanchard, ancien chef économiste du FMI, qui n’a pas hésité à exprimer ses doutes sur le fameux multiplicateur de dépense publique. Les choses sont peut-être plus simples que l’on croit : nous sommes tous en concurrence, les coûts de la sphère publique rentrent dans les prix de revient, un pays ne peut pas avoir une dépense plus élevée que ses voisins sans handicaper ses entreprises. Peut-être allons-nous enfin revenir à des raisonnements de bon sens et proclamer que le public comme le privé doivent être compétitifs. Ce serait une avancée historique !