Make Europe great again – Chronique aux Echos

23 Nov
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Kishore Mahbubani est professeur d’économie politique à Singapour. Il explique à quel point le monde est en train de changer dans son dernier livre, « Has the West Lost It ? », que l’on peut traduire par « L’Ouest a-t-il perdu la main ? ».

Au moment même où l’Amérique clame son « America first », son PIB (mesuré en parité de pouvoir d’achat) est en train de se faire dépasser par celui de la Chine. Au vu des masses et des vitesses en présence, l’Amérique n’est pas prête de la rattraper. Le déclencheur de ce bouleversement a été l’entrée de la Chine dans le commerce mondial, entrée qui coïncidait avec la chute du mur de Berlin. L’idée fausse lancée par Francis Fukuyama de « la fin de l’histoire » a fait commettre à l’Ouest un péché d’orgueil en lui faisant croire que la partie était finie et qu’il avait gagné. L’Ouest s’est alors reposé sur ses lauriers oubliant la réalité de la concurrence. Curieusement, surtout en Europe, un doute s’est installé. Nous, Européens, nous avons perdu la foi dans nos valeurs démocratiques et dans l’efficacité de l’économie de marché alors que nous devrions en être fiers : la croissance de l’Inde et de l’Asie, qui a permis d’y faire reculer la pauvreté, vient de ce que ces deux pays ont puisé de l’inspiration chez nous. Nous nous sommes jetés sur leurs produits bon marché en omettant de nous mettre sur de nouveaux métiers. En France, nous avons succombé aux délices de l’État providence pour réparer ce qu’on nommait « les limites de l’économie de marché » en rajoutant des couches de coûts sur les prix de revient de nos entreprises. Nos classes moyennes paient le prix de cette méprise. Pourtant, dans ce monde en bouleversement, certaines de nos entreprises françaises, leaders mondiaux, ont su tirer leur épingle du jeu ; si on leur tendait un peu plus le micro, elles rappelleraient que les Français sont pleins de talents et peuvent exceller. Elles expliqueraient que la mondialisation peut nous être bénéfique si nous sommes prêts à nous remettre en cause, à faire la chasse aux surcoûts publics et à prendre un peu de hauteur.