Le partage du temps de travail est un magnifique coup marketing politique mais se révèle sur la durée une fausse bonne idée.

Le partage du temps de travail est un magnifique coup de marketing politique mais se révèle sur la durée une fausse bonne idée.
Il a été imaginé il y a une quarantaine d’années par la gauche. Nous en payons lourdement les effets aujourd’hui.
Imparable sur le plan de la communication : être généreux en travaillant moins et en donnant du travail aux autres. C’est ce type de raisonnement qui a conduit à pousser le concept de la retraite à 60 ans : en partant plus tôt à la retraite, on donne du travail aux plus jeunes. Et cerise sur le gâteau, dans cette affaire nous avons tous davantage de temps libre, condition nécessaire pour se réaliser pleinement.
Un bémol à ce tableau idyllique : les résultats tangibles. Depuis que cette vision de la société et du travail s’est répandue et que nous sommes devenus de loin le pays où le temps de travail est le plus bas, nous déclinons régulièrement dans les classements mondiaux de PIB par tête, passant en quarante ans de la 7e à la 33e place. Et notre chômage reste élevé par rapport à celui de nos voisins.
On vous expliquera que le PIB par tête n’est pas une bonne mesure de la prospérité. Il n’empêche qu’il faut regarder les choses en face : en Suisse, en 50 ans le PIB par tête qui était au niveau du nôtre dans les années 1970 est le double aujourd’hui ; fait significatif, le SMIC est à 4000 dollars, le pays affiche un chômage nul, un emploi industriel double et une balance commerciale largement excédentaire.
Eh oui, nous sommes dans une économie ouverte où par la diminution du temps passé à son poste, toutes les mesures ayant pour effet d’augmenter le coût du travail handicapent nos industries manufacturières particulièrement exposées à la concurrence mondiale.
Ramener le goût du travail
Il faut reprendre les choses à la base et ne plus parler de travail mais de métier, d’un métier dont on est fier et que chacun pratique où qu’il se situe, à un niveau d’excellence mondiale.
« Tous champions dans ce que l’on fait » : là réside la source de la compétitivité dans un monde ouvert. Il n’y a pas de petits métiers. Dans les années 1960, le fondateur du Singapour moderne Lee Kuan Yu avait fait de la propreté dans la rue et dans les logements le point de départ de sa politique. Il tenait tous les matins à balayer lui-même 50 mètres de trottoir et donnait des conseils sur le choix des balais et l’art de les manier. C’était une façon de montrer que toute tâche mérite d’être effectuée parfaitement. Il répétait qu’il avait davantage de respect pour un ouvrier pratiquant son métier au meilleur niveau que pour un cadre ou un fonctionnaire médiocre, fut-il très haut placé. Y a-t-il un meilleur moyen pour créer l’unité dans un pays ? Sans compter que lorsque l’excellence devient une valeur de la société, les produits s’améliorent dans tous les domaines, les clients du monde entier ne s’y trompent pas et les ventes explosent.
Quand la dignité de chacun, conférée par l’excellence de ce qu’on produit, devient une valeur plus élevée que l’égalité formelle, l’harmonie se diffuse et la compétitivité ne tarde pas à se traduire en prospérité.
Il faut repenser notre rapport au travail et redire à tous, notamment aux plus jeunes qu’un métier bien pratiqué est passionnant, qu’il permet de prendre des responsabilités, meilleur moyen pour s’épanouir. Quand le travail est bien fait, il est source légitime de fierté. Il est une façon unique de découvrir le monde quand on est porté par le déploiement international de son entreprise.
Enfin, au contact de ses meilleurs concurrents mondiaux on peut ressentir les émotions des champions que nous applaudissons dans les stades. Le travail bien pratiqué n’est ni un enchaînement ni une punition, il peut être la voie la plus efficace pour pleinement s’accomplir en tant qu’être humain.
Xavier Fontanet
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