L’actionnariat salarié, une bonne solution pour partager la richesse

20 Juin

TRIBUNE POUR LES ÉCHOS (19 juin 2020)

 

Nous disposons désormais de cinquante ans d’expérience d’actionnariat salarié dans des grands groupes. Il est donc prouvé que ce système capitalistique fonctionne efficacement et contribue à créer un bon climat dans l’entreprise. Il faut le généraliser et l’encourager par une fiscalité adéquate

 

La période favorise les prises de conscience et les réflexions ; redonner de la dynamique à l’actionnariat salarié est parmi les idées qui reviennent à l’ordre du jour. C’est une évolution majeure de l’économie de marché, et du capitalisme parce qu’on permet au collaborateur de bénéficier directement de la création de valeur produite par l’entreprise. Une fois qu’il est installé, la question de savoir si la valeur ajoutée va au capital ou au travail ne se pose plus. Deuxième avantage, s’il se groupe avec ses collègues, le collaborateur peut participer activement à la gouvernance de l’entreprise, la base même du contrat de travail se trouve alors transformée.

Beaucoup de gens sont contre l’actionnariat salarié pour des raisons de principe. Certains politiques (il ne faut pas leur jeter la pierre) craignent de favoriser un système dans lequel les employés perdent à la fois leur job et leurs économies. Du côté des entreprises, beaucoup de familles considèrent que c’est à elles de porter le risque entrepreneurial.

Les choses sont en train de changer. Nous disposons maintenant de cinquante ans d’expérience d’actionnariat salarié dans des grands groupes comme Bouygues ou Essilor, pour ne nommer que ceux-là. Il y en a bien d’autres. Ils ont démontré sur longue période que ce système capitalistique fonctionnait efficacement et contribuait à créer un bon climat dans l’entreprise.

Pousser cette dynamique n’est pas difficile, il faut favoriser les longues détentions (afin d’augmenter le stock d’actions) et pour cela la décision à prendre est de baisser significativement la fiscalité des plus-values au-delà de 20 ans. Avoir un faible taux d’imposition quand les actions vendues ont été gardées très longtemps serait, par ailleurs, un signe extraordinairement positif envers la communauté mondiale des affaires, venant d’un pays qui a besoin de corriger son image d’enfer fiscal !

Le cas des PME-ETI est plus délicat, car on est très en retard en France. Pour donner les ordres de grandeur, l’avoir des actionnaires salariés des grands groupes est de 75 milliards d’euros tandis qu’il n’est même pas de 1,5 milliard dans les PME-ETI, alors que les effectifs sont à peu près les mêmes. D’autres pays ont, pour ce type d’entreprise, des participations du personnel au capital bien plus élevées qu’ici. Ils ont, pour tout dire, inventé des systèmes qui réduisent le risque porté par l’employé, levant ainsi les objections exprimées plus haut. En simplifiant, les salariés investissent au départ dans un fonds diversifié d’actions d’entreprises cotées. Lorsque les familles décident de vendre du capital ou de l’augmenter (pour faire des acquisitions), on puise alors dans les liquidités de ce fonds pour acheter des actions. Il y a une contrainte forte : la part détenue par les actions de son entreprise ne peut jamais dépasser 50 %. Voilà donc une piste très fructueuse dont nous pourrions nous inspirer. Il n’est pas interdit de faire mieux et de rajouter un coup de pouce pour dynamiser l’ensemble : l’Etat baisserait les impôts sur les plus-values lorsqu’une famille vend à ses employés.

L’actionnariat salarié est une solution bien plus puissante pour partager la richesse que l’ISF, parce que l’ISF démotive et pousse à l’exil (on l’a vu de façon patente dans les 15 dernières années), alors que l’actionnariat salarié, lui, motive tout le monde.

Ayons enfin une pensée pour nos fonctionnaires : pourquoi ne pas les associer à cette dynamique et leur permettre d’investir (en franchise d’impôt) dans un fonds diversifié qui soit une image du CAC 40 ? Ce serait une jolie façon d’embarquer tout le monde, ça permettrait à nos concitoyens de mieux comprendre les ressorts de nos entreprises et contribuerait ainsi puissamment à dynamiser notre économie ainsi qu’à harmoniser les rapports sociaux.

Il faut favoriser les longues détentions et, pour cela, baisser significativement la fiscalité des plus-values au-delà de 20 ans.

Tribune parue dans les Echos

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