C’est l’honneur de l’Europe d’avoir construit un modèle social unique au monde. Avec la solidarité pour pilier. Ce fut d’abord l’idée de faire cause commune quand un des membres était attaqué. Puis le fait de soutenir (en attendant qu’ils rebondissent) ceux qui connaissaient un passage à vide, qu’il soit médical ou professionnel. Ce fut enfin le principe de soutien aux plus jeunes, aux anciens et aux personnes handicapées, par ceux dans la force de l’âge.
Ce modèle, il faut avoir le courage d’expliquer qu’il n’est plus tenable sous sa forme actuelle, en particulier en France. Le budget social est en train de dépasser le tiers du PIB (richesse produite). La dette atteint le double des recettes fiscales d’un budget en déficit depuis quarante ans. Notre industrie, exposée à la concurrence mondiale, ne peut plus porter une telle charge et perd des parts de marché. Pas surprenant que le chômage monte, excluant une partie croissante de nos concitoyens.
Nos voisins européens ont réagi, notamment les Allemands. Ils ont commencé par faire admettre, avec le soutien des syndicats, que les circonstances imposaient de changer les comportements : la solidarité restait au coeur du contrat social mais un devoir était attaché à chaque droit.
Le gouvernement Schroeder fut aidé par les médias qui comprirent que la situation était grave. On installa le concept de «solidarité exigeante». Les comptes sociaux furent rééquilibrés en faisant payer les actes médicaux simples et en retardant l’âge de départ à la retraite.
Ceux qui avaient une situation stable durent accepter des horaires plus flexibles pour faciliter les efforts d’adaptation des entreprises à la nouvelle donne. Pour les chômeurs, la règle devint «Mieux vaut un job pas tout à tout à fait satisfaisant que l’horreur du chômage (même bien payé) à la maison». Et l’économie, ainsi allégée de son poste de dépenses le plus important, repartit de l’avant. Le chômage outre-Rhin tomba de 12 % à 5 % en cinq ans ! Les plus faibles retrouvèrent leur dignité à travers une activité qui leur remettait le pied à l’étrier.
Une majorité de Français est prête
Ici en France, on continue à laisser entendre que l’économie va repartir toute seule, que le problème financier n’est pas urgent et que l’on peut continuer à s’endetter. C’est retarder la prise de conscience nécessaire à toute réforme impliquante.
Les Français, n’étant pas idiots, savent au fond d’eux-mêmes que l’on va dans le mur, ce qui alimente la défiance. En laissant une partie de la population s’installer dans la dépendance (avec le chômage et le RSA qui isole), on réduit à néant toute chance d’harmonie sociale. L’État est bien obligé de financer ces dépenses, ce qui le conduit forcément à une fiscalité confiscatoire qui démotive les entrepreneurs quand elle ne les pousse pas à l’exil.
Cette solidarité permissive finit par créer une facture profonde dans la société. Pour que la solidarité conduise à l’harmonie sociale, il faut accepter quelques règles contraignantes. La majorité des Français est plus prête que l’on croit à l’admettre. La balle est dans le camp de nos hommes politiques et de nos syndicats qui doivent maintenant faire preuve de réalisme et de courage. Que cette année 2016 soit pour eux l’occasion de montrer qu’ils sont à la hauteur des enjeux !
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