Beaucoup se font les champions des prix bas, expliquant qu’ils sont les garants du pouvoir d’achat des consommateurs – c’est vrai pour ceux qui peinent financièrement. Pourtant, des différences considérables de durabilité et de performance s’observent entre des produits portant le même nom. Derrière les écarts de prix, on retrouve des écarts de coûts liés à des outils industriels, des procédés de production, des normes de qualité très différentes.
Polariser sur le prix bas restreint en fait le choix du consommateur. Pourquoi ne pas boire moins, mais du meilleur vin ? Un outil moins cher à l’achat dure en général moins longtemps. Une vieille tante me disait, forte de l’expérience de toute une vie, « je ne suis pas assez riche pour acheter bon marché ».
Tout fonder sur le prix peut aussi pénaliser le producteur en le cantonnant à l’entrée de gamme ; les consommateurs suisses, en privilégiant la qualité et en acceptant des prix plus élevés ont permis à leur industrie de conquérir le monde en se positionnant sur le haut du marché.
De causes à effets
C’est le coeur du sujet : l’achat est une prise de responsabilité qui entraîne une foule d’effets sur la société. Favorise-t-il des gens corrects, ou finance-t-il des tricheurs ? Quel est son effet sur son emploi et celui de son voisin ? Rappelons que c’est le consommateur, et non le PDG, qui délocalise en achetant des produits manufacturés à l’étranger ! Jusqu’où pressurer un producteur compétitif pour le bien du client, quand chacun de nous est en même temps producteur et consommateur ? Que veut dire pouvoir d’achat quand son emploi est fragile ?
Faut-il, dès lors, encourager les prix les plus bas ou plutôt ceux qui permettent durablement à chaque acteur de la filière de trouver son compte, d’être rentable et d’avoir les moyens de s’améliorer ? Les Français ont depuis trente ans une politique de « pouvoir » d’achat, en fait de prix bas. Les difficultés actuelles des producteurs en sont la conséquence naturelle.
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Comme indiqué sur Twitter, je partage sans réserve les idées développées dans cet article depuis de nombreuses années. Ne peut-on rien faire pour les mettre en avant au niveau national. Ns sortons exsangues de 7 ans de mythes « low cost » de 2005 à 2012. Ce mythe du « prix bas » et la stratégie collective, nationale allant avec, cumulés avec l’effet dévastateur des 35h rendues « indolores » au plan macro-économique et monétaire par le passage à l’€, expliquent à mon avis de manière déterminante notre effondrement économique.